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Aujourd'hui, en France, le fait d'être protestant ne pose aucun problème
Mais il n'en a pas toujours été de même. Les témoignages que l'on relève dans certains registres paroissiaux montrent que sous certaines périodes, "persécution" n'était pas un vain mot.
Les fondements religieux des rituels
Dès le départ, Luther rejette le sacrement catholique de l'extrême-onction car selon lui il n'existe que deux sacrements : la baptême et la cène. La conséquence est qu'il rejette aussi toute cérémonie concernant la mort, ce pour deux raisons :
- le Christ ne s'adresse qu'aux vivants
- les morts étant avec Dieu, il n'y a plus lieu de s'intéresser à eux
En conséquence, la dépouille mortuaire n'a aucune importance et peut être inhumée n'importe où ! Et cela tombe bien car l'église catholique considère que les huguenots (et plus tard les membres de la Religion Prétendument Réformée) ne peuvent être ensevelis en terre consacrée, donc dans les cimetières ...
Passant outre les notions (actuelles) de deuil, les Réformés avec Calvin et ses successeurs interdisent toute prière ou prédication pendant les enterrements. A peine une prière est-elle tolérée au retour du cimetière !
Mais le temps passe, l'Edit de Tolérance de 1787, la Révolution Française, l'Empire et les prémices de la Révolution Industrielle ont fait évoluer les mœurs. Dès la fin du XIXème siècle, les pasteurs peuvent présider les cultes de service funèbre au temple. Et on "triche" sur le dogme luthérien en autorisant dans la liturgie une "remise du défunt à Dieu".
Les familles et amis peuvent aussi témoigner pendant la cérémonie, chose qui eût été impensable à l'époque de Calvin.
Mais aujourd'hui encore, dans certains temples réformés du Languedoc et des Cévennes, les corps ne sont pas admis pendant la cérémonie.
Photo de: « Huguenot cross » par Syryatsu — Création personnelle. Sous licence GFDL via Wikimedia Commons - http://commons.wikimedia.org/wiki/File:Huguenot_cross.svg#/media/File:Huguenot_cross.svg
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Les conséquences pratiques de "l'exception" protestante
Entre le début de la Réforme et la seconde moitié du XVIème siècle, la position des protestants se dégrade en France puisqu'il est interdit à un protestant de se faire inhumer dans les cimetières ni dans les terrains voisins.
En 1562, l'Edit d'Amboise impose un enterrement de nuit et il faut attendre 1598 et l'Edit de Nantes promulgué par Henri IV (protestant lui-même par sa mère avant sa conversion au catholicisme lors de son avènement - "Paris vaut bien une messe !") pour que les protestants aient le droit de disposer de leurs propres cimetières et qu'ils aient le droit d'y enterrer leurs morts de jour.
C'est de cette époque que sont nés les "cimetières protestants" que l'on trouve encore de nos jours dans les régions ayant jadis abrité des populations protestantes importantes (Ardèche, Drôme, Cévennes, etc.) et qui peuvent nous donner un aperçu des patronymes huguenots.
Nouveau rebondissement en 1685, un arrêt du Conseil d'Etat interdit aux réformés de disposer de cimetières dans les lieux où les cultes ne sont plus exercés, ce qui, de fait, les prive de nombreux lieux de sépulture pour leurs morts.
C'est à cette période que se développe donc cette habitude d'enterrer ses morts chez soi. En ville, ce sont les caves ou les jardins qui servent de lieu de sépulture, tandis qu'à la campagne, ce sont des parcelles qui sont destinées à cet usage.
Aujourd'hui encore, il existe de nombreux lieux qui constituent autant de cimetières privés, ce qui n'est pas sans causer quelques problèmes.
En 1736, Louis XV institue une procédure judiciaire permettant l'inhumation des Réformés. Les prêtres et curés perdent donc la main au profit du Roi.
En 1776, Louis XVI impose le transfert des cimetières hors des agglomérations et le même Louis XVI, par son édit de Tolérance de 1787 autorise l'inhumation des défunts protestants (et juifs également) dans des cimetières. Ces derniers devant être fournis par les municipalités.
Pour terminer, le décret-loi du 23 prairial an XII ne permet les inhumations en terrain privé (indépendamment de la religion) que sur autorisation du Maire (actuellement du Préfet), et à condition que le lieu se situe hors de l'enceinte des villes et bourgs et à une certaine distance de ces derniers.
Et aujourd'hui ?
Aujourd'hui, la France est un pays laïc qui offre donc à ses citoyens, indépendamment de leur religion, la possibilité de bénéficier de l'usage des cimetières municipaux.
Cependant, le droit est ainsi fait que les cimetières privés existants ne peuvent être considérés comme un terrain "normal" car une sépulture privée est considérée comme perpétuelle, inaliénable et incessible.
En conséquence, si vous achetez une propriété sur laquelle se trouve une tombe, vous devez :
- conserver un droit de passage pour les héritiers
- savoir que ce droit est non prescriptible
- maintenir en l'état la sépulture car si elle est déplacée ou si l'on considère qu'elle a fait l'objet d'un acte, même non intentionnel ayant pour effet de violer le respect des morts, cela est considéré en droit comme un délit de violation de sépulture !
Par ailleurs, la procédure de reprise de concession funéraire en état d’abandon ne pouvant être mise en œuvre que dans un cimetière public, elle ne s'applique pas à un cimetière privé ...
Toutefois, le Maire peut faire exécuter une procédure d’expropriation pour cause d’utilité publique.