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Les alluchons, tout savoir...
Le bois dont on fait les alluchons

Pour une fois, ce n’est pas du bois avec lequel je me chauffe dont vous allez entendre parler…

Laissant de côté les tumultes de l’actualité, je vais vous causer « alluchons ».

Non, il n’y a pas d’erreur de transcription, je n’ai pas l’intention de faire mon balluchon, mais je m’intéresse à un bois très dur, l'alisier, qui avait des usages bien particuliers dans les temps anciens.

Il fut une époque où l’on savait déjà construire des systèmes de transmission (arbres, roues dentées, engrenages) mais où l’on n’utilisait pas encore l’acier ou le bronze, soit parce qu’ils étaient trop coûteux, soit parce que l’on ne savait pas les usiner avec suffisamment de finesse, ou bien encore parce que l’on avait besoin d’un minimum de « souplesse » dans la liaison entre les composants du dispositif, souplesse que le métal n’offre pas vraiment.

On fabriquait alors les systèmes de transmission en bois, et, pour les pièces qui travaillaient beaucoup (« pièces d’usure »), on choisissait bien évidemment des bois très durs.

L’usage du frêne était assez répandu, mais l’essence que l’on appréciait le plus était l'alisier , qui possède les mêmes propriétés que le cormier, à ne pas confondre avec le sorbier des oiseleurs.

l'alisier était alors l’un de nos bois les plus précieux, parce qu’il possédait un grain fin et qu’il était l’un des plus durs de nos forêts. Si j’emploie l’imparfait c’est que de nos jours, on ne trouve pratiquement plus de grumes d'alisier dans les scieries : il s’agit d’un arbre en voie de disparition.

Les alluchons, tout savoir...

L’un des domaines dans lequel on appréciait le plus les propriétés du bois, c’était dans la mécanique des moulins à vent ou à eau.

Les ailes du moulin étaient montées sur un axe (généralement un tronc de chêne) comportant un énorme volant, le rouet.

Celui ci était équipé de dents qui, en s’engageant entre les rayons d’une cage montée sur un axe vertical (pièce appelée aussi lanterne), permettait de transmettre à angle droit le mouvement de rotation de l’axe principal : grâce au rouet denté et aux fuseaux de la lanterne, l’arbre horizontal en entrainait un autre qui, lui, était vertical. Inutile de préciser que l’on ne maitrisait pas les sautes d’humeur du vent et que s’il y a une pièce qui « souffrait » lorsque le moulin fonctionnait, c’était bien celle-ci.

Pour maintenir le dispositif en état, il fallait veiller à ce que les précieux « alluchons », les dents de bois plantées sur le rouet, ne soient ni brisées ni trop usées. Le bois d'alisier était considéré comme le plus performant pour réaliser ces précieuses dents et leur fabrication demandait beaucoup de précision.

Ce travail était l’œuvre d’un charpentier de moulin qui traçait et découpait chacune des pièces à la demande. Certes l’espacement des rayons de la « cage » en bois était régulier, mais il était nécessaire d’ajuster chaque alluchon de façon précise à l’interstice dans lequel il devait s’emboiter. Cela d’autant plus que, dans beaucoup de moulins, cette transmission pouvait être débrayée lorsque soufflait un vent trop violent ou que l’on voulait procéder à des travaux d’entretien.

La problématique était à peu près la même dans les moulins à eau, et l’on faisait appel très souvent au même dispositif, rouet avec des alluchons et lanterne. De nombreux moulins anciens sont actuellement remis en état, souvent par des bénévoles.

Les alluchons, tout savoir...

L'alisier avait d’autres usages traditionnels: on s’en servait également pour réaliser les vis de pressoirs, les navettes de métier à tisser, les semelles des rabots.

La finesse de son grain permet en effet des découpes très précises, et une fois poncé avec soin, il devient aussi lisse que du marbre.

Il est donc aussi recherché par les ébénistes pour réaliser des placages décoratifs, les luthiers pour fabriquer les mécanismes de piano, les tourneurs qui font avec des manches de couteaux, les armuriers qui taillent les crosses des fusils ou les sculpteurs et les graveurs.

Ces derniers artisans considèrent qu’il est l’un des meilleurs matériaux pour le travail dit en « bois debout » (débit perpendiculaire à la fibre et non dans le sens du bois).

Seul le buis peut l’égaler, mais, pour ce dernier, il est impossible de trouver des blocs de taille importante.

Le bois d'alisier avait aussi un usage ludique puisque l’on s’en servait, notamment dans la région de l’Anjou, pour réaliser les boules du jeu dit « boules de fort ».

Ce jeu présente quelques ressemblances avec la pétanque, si ce n’est qu’il se joue en salle et que le terrain est légèrement relevé sur les bords. Pour placer sa boule le plus près possible du « faible » (la cible) il faut tenir compte impérativement de la dérive latérale liée à la pente du sol…

Tag(s) : #Botanique
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